UNE VISION ÉTROITE
Du plomb dans l’aile
et du givre au pare-brise
front bas sourcils froncés
vision rétrécie
j’avance à roue lente.
Toute la nuit le givre
a tissé sa toile dure
tendu ses lianes déployé ses fougères
sur le verre du pare-brise –
j’avance, j’hésite.
On n’a jamais du monde qu’une vision étroite
voilée opaque partielle partiale
car soumise aux parasites de nos orbites
de nos pensées, de nos histoires.
Pour retrouver une vision plus large
pas d’aigle ni de lynx mais disons
une vision d’homme
il faut rouler il faut parler
(sans dédaigner le subterfuge
d’une soufflerie chaude qui n’est pas le langage).
Bientôt le voile se déchire
et le monde réapparaît
large net précis lumineux jusqu’au
prochain virage
et cette combe brouillardeuse
où fatalement la vision retrouve
ses bornes étroites.
6 janvier 2016