Faire de chaque trajet un poème, ce n’est pas nécessairement faire un poème à chaque trajet. Produire est secondaire, dire n’est qu’un moyen pour quelque chose qui déborde le seul acte littéraire.
En un sens il s’agit ici d’être acteur de sa vie, de pleinement « faire », de donner toute son importance et toute son ampleur au trajet en lui-même. On convoque au besoin des symboles (la route vue comme la vie, avec ses étapes obligées, son déroulement imposé, etc.) mais sans se détacher de toutes ces « choses vues » qui ne sont ni des symboles, ni des signes.
Septembre m’a surpris. J’ai été surpris en ce mois de septembre dernier par cette possibilité de voir et de dire qui m’a été offerte avec une intensité systématiquement renouvelée. Les textes qui précèdent ont permis cet étonnement-là, qui me rappelle celui qui me saisissait autrefois lorsque, collégien, je devais toutes les trois semaines répondre à l’obligation d’écrire et de rendre une rédaction : que la copie blanche dût nécessairement se remplir de mots, que cela fût somme toute inéluctable alors que je n’avais pas la moindre idée de ce que j’allais bien pouvoir y écrire, me remplissait de stupeur (et, une fois l’épreuve terminée, de contentement).
Vient l’envie de continuer, car la route est meilleure avec les mots que sans. Je m’impose ce défi : « faire de chaque trajet un poème » et, pour ce faire, écrire un poème à chaque trajet (tout au moins à l’aller, le retour étant plus paresseux).
L’annoncer ainsi m’intimide, je sens monter l’angoisse de la route blanche.
On verra bien.
On essaiera de bien voir − de voir, de dire au mieux…
1er octobre 2015