Vigie, avril 2023

 

J’avril

 

 

Avril fébrile

tout frémissant tout tremblotant

et gracile,

avril au prunier en parade effleuré par la brise

et si fragile

qu’à son orée on rêve plus que jamais

d’îles et de livres

ou d’un enclos

pour protéger les pétales du vent

et le cœur des rafales du temps,

avril facile qui fait tomber des cimes

des rimes qu’on ramasse plus aisément

que les fuyantes morilles,

avril jeune faune qui file cheveux au vent, 

ou faon malhabile à la course hésitante,

avril intranquille lorsque tourne le vent,

avril subtil quand les notes les plus aiguës du chant du roitelet

se mêlent aux trilles du troglodyte

sur fond de grand orchestre torrentiel,

avril beau parleur dont on croit les promesses

quand le merle moqueur semble dire

que le monde se préoccupe de nous,

avril cruel quand il te jette à terre

en quête des morilles

le nez sur la jeune grive tombée du nid

et qui crie,

avril avare qui cache ses trésors,

avril comme un rocher glissant,

avril entravé par les ronces nouvelles,

avril délivré par la poussée des fougères,

avril tout rutilant de rus et de soleil,

attends-moi, je suis à toi dans un instant,

le temps de passer le harnais à mon chien

et de prendre un carnet, 

j’avrile.

03/04/23

 

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