Lac des Fées (Beaufortain)
Pour venir jusqu’au Lac la route tourne et grimpe à en donner le vertige. Après avoir parcouru un tel sentier, en arrivant en ce lieu de si beaux reflets, il n’est pas étonnant de croire voir des fées. À propos d’étonnement il faut dire que tout le paysage s’est obscurci, que le vent s’est mis à souffler et que ça tonne sacrément de l’autre côté du pic. Tonnerre, cris de marmottes affolées, du côté du col le ciel noircit encore, il blanchit au-dessus des crêtes, et la crainte fait fuir les familles, les promeneurs. « Tu ne crois pas que la route va se transformer en torrent ? – Oh, ce n’est rien… »
Moi je ne veux pas partir. Je veux attendre ici l’orage, sentir l’eau ruisseler sur mon corps, entendre chanter les abeilles de la foudre ! Le vent plie le rhumex, trouble l’eau verte où dérive un morceau de bois comme le ferait un petit bateau oublié par un enfant. Souffle frais sur l’épaule nue – caresse et crainte, le lac a la chair de poule. Tout noircit, tout blanchit. Si je reste ici, je connaitrai le Paradis.
Les premières gouttes et puis – dans le rétroviseur on voit l’orage s’abattre lentement sur le Lac des Fées.
© Lionel Seppoloni, tous droits réservés.