L’habitude de l’art, et la main qui tremble !
Ce jour-là j’ai joué (pour eux, pour cette séance « autour du haïku » menacée d’apesanteur par la tiédeur déjà estivale et qu’il fallait donc lester, mais aussi je l’avoue parce que j’avais besoin de m’entraîner en public afin de tenter de conjurer le trac) la chaconne de Pachelbel, en tremblant comme je le fais dès lors que je joue en étant écouté. Je revois leur air interloqué devant le peu d’assurance, la fragilité assumée du professeur métamorphosé en musicien débutant et indubitablement traqueux… Ces lignes, donc, pour mémoire.
La main tremble le son
pourtant ne défaille
pas, la main
tient bon la ligne vacillante
de la mélodie qui court
qu’on craint de lâcher à cause
de la vie à vif
de la vie à nu
et l’on continue
grave dans l’insouciance
de ce mois de leur jeunesse
le petit orgue noir la tristesse
en bandoulière devant eux, pour eux,
à nu sans les mots et tremblant,
tremblant jusqu’au bout.
28/05/15