Vigie, avril 2022

 

Jour de neige (2)

 

Vigie04202201

 

Il neige. Après de longues heures passées à réparer mon site (l’opération, qui consistait à patiemment supprimer et remplacer un à un les dossiers, a finalement été couronnée de succès), je repars à la suite de Rimski, qui adopte aussitôt la petite foulée dynamique du chien de traîneau, avec son maître dans le rôle du traîneau. Je ne sais pas si les bêtes sauvages éprouvent du plaisir à courir dans les bois, ou seulement la peur d’être tuées et le désir d’attraper une proie. Est-ce que c’est la part sauvage de Rimski qui s’exprime lorsqu’il manifeste son plaisir de trottiner dans la neige, ou bien est-ce que c’est le contraste entre le temps passé à simplement farfouiller dans le jardin (lui n’avait pas de site Internet à réparer) et cette balade qui lui permet enfin de se dérouiller les pattes et de rendre visite aux chevreuils ? Toujours est-il que lorsque je le vois ainsi dans la forêt enneigée, ce n’est plus ma grosse peluche domestique que je vois mais un petit loup blanc (et ce d’autant plus qu’il tient sa queue déroulée).

Les pistes des animaux sont de nouveau visibles dans cette neige fraîche, et l’on comprend pourquoi il bifurque soudain vers le torrent, appelé par un désir qui n’est pas de baignade. Voici cependant que file une petite boule de neige très rapide au-dessus du Gelon : c’était la tache blanche du cincle plongeur, bien sûr. Les stalactites se sont reformées, et les tunnels de branches affaissées sur le chemin. Un rouge-gorge vient se poser sur le mur de la ruine du moulin.

On avance en silence.

Gros plan sur les bourgeons enchâssés comme des émeraudes dans leur écrin de neige, et sur la touffe d’herbe hirsute qui, prise dans la neige, ressemble à un oursin.

Plan de demi ensemble sur l’allée des saules enneigés où disparaît la silhouette de l’homme au chien.

Travelling très lent sur la vieille cabane qui semble avoir glissé au bord du torrent comme la cabane de Charlot dans La ruée vers l’or.

Je savoure ce silence sans parole comme je savoure ce blanc lumineux, uniforme et fragile d’avril.

 

02/04

 

Ce contenu a été publié dans 2022. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.