Jours d’été
C’est un dimanche d’été dans le jardin du Villard où je suis attablé avec un livre et mes jumelles. Un couple de mésanges huppées s’agite autour de moi, en quête des poils de chien qui serviront au nid. Le thermomètre indique 29°. Dans cet air chaud saturé du pollen des bouleaux, on ne respire pas si bien.
Ce sont des jours de dérive tranquille, sans emploi du temps, sans cap, comme naguère en Guyane, car même si j’ai passé quelques heures à réécrire le livre de ma « mémoire indienne » je n’ai pas le sentiment d’avoir avancé dans une direction déterminée mais plutôt musardé, me laissant aller aux sensations du moment.
En forêt je constate que le muguet est en fleurs, naguère c’était en mai. Je repère les morilles à l’odeur, mais n’en ramasse que de rares poignées, loin du millier qu’affiche Thierry qui a, par ailleurs, le triomphe modeste, et en fait profiter tout le monde : même dans ce domaine, je reste un dilettante.
Dans le pré vert les orchidées tachetées d’un mauve magnifique s’épanouissent. Elles ornent aussi le sous-bois et les bords du chemin, que traverse soudain trois merles hystériques dont les stridulations affolent Nouchka. L’odeur de miel quand on passe au pied du grand laurier est à se pâmer. Rimski, pour aboyer après un vêtement oublié sur un piquet, prend sa voix la plus grave, la plus rauque, comme il le fait toujours face à un danger inconnu.
Puis l’odeur camphrée particulièrement forte des thuyas confirme que le temps est en train de changer, plus humide. Les nuages regagnent le ciel et sans doute il pleuvra. C’est l’acmé du printemps qui se prolonge un peu, tout est très beau et très fugace. On annonce la neige, comment y croire ? Comment garder un cap dans ce monde sans boussole ?
14/04/24