Route, novembre 2014

 

 

 

 

QUELQUES TROUÉES

 

Un grand vent tiède s’est engouffré hier soir dans la vallée, qui a mugi toute la nuit. Les arbres n’ont pas été dépouillés pour autant ; il semble au contraire qu’il y ait ce matin deux fois plus de feuilles et de couleurs, comme si les feuillages se reflétaient dans le miroir du sol. 

Le vent est tombé maintenant, la route est bonne et belle. Le ciel gris rehausse le jaune orangé des forêts. Cerné de gris l’éperon du Granier se trouve soudain illuminé par le soleil levant. Un peu de cet éclat reluit dans le jaune tout neuf des mélèzes, cependant que la longue usine Leborgne du fond de la combe envoie sa fumée et ses odeurs de colle. 

Une forme blanche bondit à travers le champ vert, et mobilise soudain toute mon attention toujours plus ou moins défaillante : j’espère une hermine, mais cela semble bien gros et je ne suis pas sûr que les hermines soient déjà à ce point en pelage d’hiver. Ce n’est en fait qu’un jeune chat blanc, très élégant, qui chasse dans le champ. 

Ce sursaut de l’attention permet néanmoins une sorte de réveil, et l’on voit ensuite avec moins de flou le merle posé sur une branche jaune, la cheminée qui fume sur fond de ciel enfumé, et cette trouée blanche tout au fond du ciel gris. 

 

4 novembre 2014

 

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