Remous d’automne

Dans la nuit une averse assez intense rafraîchit l’atmosphère, si bien qu’au matin tout paraît reverdi. Au pied des troncs les rejets des châtaigniers semblent poussés d’hier, vert tendre tout luisant dans la lumière précise que tamisent quelques nuages. Curieusement, parce qu’il est seul au milieu du pré dont les hautes herbes ont jauni, le grand châtaignier rond que je photographie presque tous les jours a pris quant à lui une tonalité plus automnale, que je retrouve aussi dans cette image des pommiers dont les fruits ont spectaculairement grossi et sur le chemin creux jonché de feuilles mortes et de noisettes. C’est toujours ainsi, la première semaine d’août marque le dernier mouvement de l’été, le premier de l’automne, avec des nuances différentes suivant les années et les jours.
Une odeur de foin fermentée se mêle insidieusement à celle du nant. Après la passerelle, l’odeur des impatientes au faîte de leur floraison s’impose, capiteuse, orientale, envoûtante, ce sont désormais dans les fragrances des invasives que se fixe le mieux le souvenir sensible de cette période de l’année. Et puis voici le pont où, bien que les arbres qui l’obstruaient aient été tronçonnés et dégagés et que les feuillages ne baignent plus dans le torrent, je retrouve ravivée au centuple cette odeur piquante qui m’avait tant frappé les semaines précédentes et me ramène donc en arrière, au cœur de cet été pluvieux.
Tous ces petits déplacements des saisons mémorielles font, au sein de ce tour quotidien de ma promenade, comme de fins tourbillons dans l’eau d’une rivière dont le cours n’est linéaire qu’en apparence, et circulaire en vérité.
03/08/24


