Vigie, décembre 2024

 

Le grand cerf

 

 

On n’avait pas vu autant de neige un 24 décembre depuis des années. Les préparatifs pour la promenade relèvent de l’expédition. Les gestes les plus anodins, comme franchir la barrière, requièrent une attention nouvelle. Les traces sont de nouveau lisibles : celles de la fouine, celles de la martre qui a traversé en ligne droite le jardin d’Élodie, celles des sangliers qui ont retourné toute la lisière pour se nourrir de châtaignes, celles des renards, des chevreuils, d’un lièvre (longs traits intermittents de sa course à travers champ), des cerfs, des blaireaux qui sont quand même sortis de leur terrier. Je me hâte vers le piège, qui m’a permis avant la neige de comparer la façon qu’ont les sangliers et les chevreuils de chercher leur pitance : le groin au sol, bien sûr, pour l’un, la patte raclant précieusement les feuilles pour l’autre…

Cette fois, les bêtes sont passées derrière la caméra, qui n’a enregistré que la fuite d’un renard, le passage furtif d’une martre et le poil gris en très gros plan d’un sanglier qui est venu se frotter au tronc ; mais dans la nuit c’est un douze cors à l’imposante ramure qui surgit, allonge le cou pour flairer, et à l’aube suivante une biche qui, pendant cinq longues minutes, broute avec anxiété les herbes qui dépassent.

Pendant ce temps, on se réjouit près du feu dans les maisons de la vallée où nous autres chanceux, épargnés par les guerres, les cyclones, la misère, festoyons.

 

24-25/12/24

 

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