Vigie, février 2020

 

 

 

La grippe

 

 

Vigiefevrier202004

 

La grippe vous va très bien…

Higelin & Fontaine

 

 

Chaque nuit depuis quatre nuits la fièvre fait trembler l’enfant. Je dors près de lui, surveillant son sommeil, atténuant comme je peux ses quintes de toux. Je me dis qu’il est doux au fond d’être malade quand on est un enfant choyé, aimé, entouré, et je repense à la terrible « Leçon » de Jaccottet, dans laquelle il est question d’un vieillard redevenu comme un enfant mais « sans le secours des pleurs, sans plus aucun secours »… Quels rêves, quelles images habitent cette petite tête qui n’en finit pas de gémir et s’agiter ? « Une course de voitures délirantes qui n’arrêtaient pas de se métamorphoser en toutes sortes de bêtes », me dit-il au réveil – pas tout de suite, car ses propos sont alors absolument inintelligibles, mais un peu après.

 

La grippe, cependant, interrompt le cours ordinaire des choses : on ne joue plus de saxophone ensemble, il n’y a plus d’école pour lui et je reviens seul en voiture entre deux cours pour m’assurer que sa convalescence se passe bien, nettoyer son nez et ses yeux, passer de la pommade sur la peau brûlée par le mouchoir, reprendre la température, donner à boire, et tout cela rappelle le temps heureux de la toute petite enfance, fait rêver, donne envie de pleurer parfois, de retomber soi-même en enfance, ou d’attraper la grippe.

 

 

 

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