Route, mars 2014

 

 

UN ACCUEIL PLUS FRANC

  

Matin très clair, très lumineux. On repart sur la route du Villard avec en tête les images des milans qui en ce moment remontent la vallée du Rhône au retour de l’Afrique. Leur courage donne du courage. Leur force et leur beauté donnent de la force et rendent à la beauté toute la part qui lui revient. On se reprend à penser qu’une grande part des peurs et de ce qu’il est convenu d’appeler « problèmes psychologiques » pourrait être levée simplement en changeant d’échelle, simplement en agrandissant son espace. En allant sur le fleuve, en suivant le mouvement des migrations, en renouant avec le vent. (Bien sûr, ce n’est pas tout à fait juste. On s’est trouvé aussi, face à une telle ampleur, démuni et misérable. On constate cependant que l’escapade printanière en Camargue a permis un accueil plus franc à ce que Mars offre de lumineux, de joyeux.)

 

Hier soir au retour, tout le troupeau des cerfs était massé ici, dans le grand champ ; c’était la pleine lune et nous sommes restés un moment à les regarder avant de continuer la route.

 

Il monte des prés brûlés une odeur de cendre. Mais ce qui frappe surtout c’est, outre le jaune foncé des forsythias, le vert renaissant des champs.

 

Un écureuil fourrage parmi les feuilles, relève la tête à mon approche, repart dans la forêt (est-ce celui-ci que je retrouverai mort quelques jours plus tard ?).

 

La neige des sommets éblouit, la combe que je traverse est encore dans l’ombre mais sans que le paysage apparaisse divisé, séparé, comme c’était le cas en hiver ; on sent bien que la lumière descend sur nous, nous baigne, nous nourrit comme les eaux descendues des montagnes nourrissent les prés, les rivières et les nappes phréatiques.

 

Il fait encore un peu frais, quatre degrés seulement. Une cheminée qui fume voile le paysage puis c’est la brume qui stagne encore dans les sous-bois. Là-bas au fond les premiers rayons de soleil frappent les toits de Saint-Pierre. Même les vers qui dévorent les cadavres du cimetière doivent s’en tortiller de contentement…

 

 

17 mars 2014

 

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