Vigie, mars 2008

 

 

 

DEHORS

 

Après plusieurs jours de neige le retour triomphal du printemps incite à s’installer dehors, sur la terrasse, face à la longue barrière de la Chartreuse. Sans doute est-ce encore un peu trop tôt (« J’ai des doutes sur le passage à l’heure d’été »); il faisait presque chaud tout à l’heure et le bourdonnement des insectes, le ciel très bleu, les chants d’oiseaux donnaient l’impression que rien ne changerait plus – mais rapidement le vent s’est levé, le ciel s’est voilé. Douceur et fraîcheur alternent au gré des coups de vents, comme la neige alterne encore avec l’herbe rase dans le jardin et les champs.

Moi, je n’écris pas, ou bien juste une ligne de temps à autre entourée de silence. Avec beaucoup de prétention je pourrais évoquer la musique de Satie, mais je ne joue pas de piano. Je joue plutôt au concierge, au concierge de ce printemps dont je consigne paresseusement les allées et venues.

Bourrasque dans les pins. Un chien aboie, puis tout s’apaise.

Ce cri qui s’achève en papier froissé, on le reconnait aussitôt : le premier rougequeue !

Appels entêtés des pinsons, des mésanges, des enfants au loin, et du chat qui miaule.

Une voiture qui passe. Les nuages qui passent. Le temps qui passe.

Le chien Ulysse rentre chez lui, le chat Chadek reste là embusqué sur ma table.

Tambourinage d’un pic, quelque part à main droite.

Le soleil.

La cloche immobile silencieuse de l’ancienne école reconvertie en gîte communal.

La dent de Crolles au fond du paysage.

Le rire du pic.

Les traces dans la neige.

Les primevères et le forsythia en fleurs.

Le bourdonnement des mouches.

Un bouquet de jonquilles encore en boutons.

Les monticules laissés par les taupes.

Bramefarine.

Le chalet d’en haut, toujours fermé, et Belledonne au-dessus.

Un bol de thé brûlant.

L’enfant qui appelle.

Le vent qui s’apaise.

 

30 mars 2008

 

 

© Lionel Seppoloni, tous droits réservés. 

 

 

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