ÉCRIRE AVEC LA NEIGE
On peut écrire avec la pluie. Elle chante.
On n’écrit pas avec la neige.
On se tait.
(Ou peut-être, à voix blanche,
imperceptible
comme un pépiement de roitelet
ou un bruit de grésil
un grattement
un frottement
le va-et-vient d’un souffle
ces quelques lignes intermittentes
tracées à l’encre sympathique.)
Tout de même quand l’averse redouble, cette exaltation, cette joie voltigeante qui pousse à la parole. On ne peut pas rester tout à fait muet devant tant de beauté ! — Assis à la fenêtre l’enfant, lui, babille comme un pinson.
Intérieur doux et musical, extérieur froid et silencieux — entre les deux la transparence de la vitre et le regard qui va et vient.
On écrit toujours avec, autour et sur cela.
On n’écrit jamais que sur de la neige, petite brûlure vite effacée, éclat bref quand le regard traverse le blanc et que tombe en soi quelque chose comme une averse de neige.
Ce chant-là :
la neige tombe sur la neige
(le besoin de ce chant)
pianissimo
violon sans cordes
accordéon au soufflet crevé
oui pourtant ce souffle, ce chant
obstiné
comme une averse de neige.
Samedi 30 novembre 2013
© Lionel Seppoloni, tous droits réservés.