Route, mars 2015

 

 

DES VESTIGES

 

 

Les nuages gris ravivent le jaune des prés. Sous-bois et bas-côté sont encore parsemés de vieille neige.

Trois images prises en rafale dans le mouvement de la route :

la jeune fille debout au bord de la route à l’arrêt du bus scolaire, qui regarde les crêtes blanches sur fond gris ;

le chien noir assis dans la même position qu’elle, et qui regarde la voiture passer ;

à l’intérieur de la grange, tout un fagot de rameaux orangés ôtés aux saules têtards. 

Ces vestiges de la vie campagnarde sont donc encore utilisés, tout au moins dans cette ferme qui semble elle-même un vestige. Je garde en tête l’image de ce fagot coloré brillant dans la pénombre de la grange.

Au rez-de-chaussée de la maison des pompiers, un chat s’est installé derrière les croisillons de la fenêtre et regarde lui aussi la route qui offre aux corneilles son festin de grenouilles rousses écrasées ; à l’automne ce sera des noix, à l’été des cerises écrasées. La route meurtrière de bêtes, la route qui blesse le paysage et coupe la forêt, se trouve ainsi intégrée à l’écosystème, et pas séparée de cette nature qui englobe tout.

Ce grand pylône sur fond bleu : plus fragile et moins vivant, mais pas moins ample qu’un chêne.

 

17 mars 2015

 

Ce contenu a été publié dans 2015. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.