FLORAISONS TARDIVES
Comme les chrysanthèmes en novembre
ou ces vieux fous des romans japonais
que la vieillesse libère
la route s’est parée d’une beauté tardive.
Longs cheveux roux dénoués
elle se cambre elle se dore
plus impétueuse qu’en ses pâleurs d’avril
elle a des écarts des éclats des abandons
de feuilles offertes, de douceur hors saison
elle murmure avec la bonhomie
de qui n’a rien à perdre sachant qu’il va tout perdre :
c’est un peu tard mais pas trop tard
pour rutiler.
Dans le pré jaune un agneau cabriole
deux corneilles repues dansent sur la chaussée
qui croasseront demain dans la bise
l’érable du virage est en feu, la montagne
maquillée comme pour un jeu d’enfants −
que tout cela fatalement ternisse
fait la beauté de ce tableau
comme nous tous soumis au temps
comme nous autres qui devenons pourtant
(que personne n’en doute !)
plus pauvres et plus riches
plus fragiles et plus beaux
de saisons en saisons.
28 octobre 2015