Route, novembre 2012

 

 

 

APRÈS LA NEIGE

 

 

Conduite sous la neige. On a changé de livre, c’est un autre volume. Blanc, blanc. Chassé-croisé des chasse-neige. Gyrophares dans le matin blanc. Marche arrière zigzagante pour permettre au car de passer. On repart dans la nuit sous l’averse de neige avec ce bruit d’eau, ce bruit de bateau, derrière la voiture à cause de la neige chassée. Derrière-moi, une longue file de voitures. Devant moi, le gris et blanc de la route. Ciel barré. Quelques lueurs à peine. Bifurquer vers la combe. En contrebas la neige n’a pas tenu, l’averse n’est plus que de pluie. L’attention s’égare. On repense à la route. On repense aux voies de garage. Le mot de destin vient en tête, beaucoup trop emphatique évidemment. La question serait juste de savoir : qu’est-ce que j’ai à faire ? Peut-être que ce que j’ai à faire, ce n’est pas, ce n’était pas de devenir lama. Peut-être que ce que j’ai à faire, ce n’est pas non plus, ce n’était pas de devenir écrivain ni poète (d’écrire, de tenter d’écrire des poèmes). Peut-être ce que j’ai à faire, c’est juste de parcourir cette route en hiver. Regarder le torrent qui déborde des ornières, ces quatre chevaux qui brusquement se sont mis à galoper à travers le champ détrempé. Peut-être ce que j’ai à faire c’est juste de traverser l’hiver, et de rester en vie…

«…Pourtant, ne nous quittant jamais d’une semelle, [la poésie] est bel et bien là, nom générique d’à peu près tout ce qui nous incite à regarder, à écouter, à humer, à goûter, et à peser avec décision sur la colossale ténuité du vaste Rien absolu .» Gil Jouanard, Moments donnés.

 

22 novembre 2012

 

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