BLANC
Blanc
ciel blanc
bascule
s’enfoncer dans ce brusque
changement de ton
dans ce blanc
ce ciel blanc
cette nappe
pas pour une fête
sapins dédoublés
chat blanc à l’affût dans le pré
chat blanc à l’affût dans le pré (un deuxième)
ce pré : une coupe à blanc
horloge blanche sur le clocher de l’église
panneau blanc
blanc
trou de mémoire
le ciel aussi a oublié
et la montagne
et le tronc courbé du bouleau
oublié
écrire sans encre
sur le ciel blanc
sur blanc
suivre les traits intermittents
les bandes blanches discontinues
qui mènent vers
pas la maison
mais tôt ou tard
au plus loin de la maison
et derrière les volets blancs
de la maison abandonnée
ou momentanément habitée
un homme au visage pâle
ne se souvient pas
un homme dont le visage pâle
s’efface comme le
blanc de l’écume
blanc de la citerne
signes blancs disposés au long de cette route blanche
pas neigeuse encore
ni couverte de givre
juste blanche
sans éclat
route d’absence
route sans rien
route du rien
au bout de laquelle
rien
trait blanc
mauvaise conscience
inconscience
aconscience
a
â
ah! ah! ah!
bouche bée
oh!
ah!
cris blancs
voix blanche
qui n’empêche pas le cri
panique blanche
sans fondement
sans raison
sans éclat
poème blanc
lanterne
blanc mat
pas du tout immaculé
bordé de montagnes et de nuages gris
la vieille femme au dos plié
de vieux bouleau blanc
peine à grimper les quatre marches
(c’est la même image que la semaine dernière
elle semble avoir passé ainsi la semaine
à mi-chemin entre la deuxième
et la troisième marche)
blanc
ciel blanc
changement
de tonalité
la silhouette sombre de la buse
au buste barré de blanc
sur ce fond blanc
changement
du tout au tout
du tout au rien
du rien au tout viendra peut-être
mais on n’en est certes pas encore là
pour le moment
seulement ce mouvement
comme un balancier
qui oscillerait dans un seul sens
une seule fois
un seul battement
un seul expire
suivi par nul inspire
blanc
un seul mot
une seule couleur qui n’en est pas une
mais les suppose et les rend possible
blanc
ciel blanc
contaminant ce qu’il recouvre
et le blanc ainsi s’immisce partout
jusqu’entre les lettres de ce poème sans encre
et dans la voix qui le profère
blanc
et l’on clame
blanc !
comme un coup de feu assourdi
pas une fulgurance
juste un craquement
perdu parmi les arbres nus
blanc
ce rien
finalement
pas même l’hiver
à peine présence
blanc
neutre
pas vide ouvert accueillant
juste blanc
ciel blanc froid
lignes blanches discontinues
bouleaux blancs
signe blanc
blanc
comme un battement de porte
refermée trop violemment
proche parent de vlan
et de lent
qui suppose cependant un effort
ahan
ahan
qui suppose
qui impose
qui s’impose
blanc
comme une mélopée
répétitive
un rythme pour rien donné
sur la partition blanche
rien que du blanc
pas même un soupir
et pas d’autre partition
que ces lignes électriques
découpées
sur le ciel blanc.
19 novembre 2012