Vigie, mai 2009

 

 

 

REFUGES PRÉCAIRES

 

 

Matin d’été, on file marcher en famille au-dessus du Bourget en Huile. Hélas ! l’exploitation forestière a transformé la belle clairière en champ de ruines, et le petit sentier en autoroute pour char d’assaut… On pique-nique en contrebas pour ne pas voir cela, juste à côté d’une gigantesque antenne relais pour téléphone portable que l’on n’avait d’abord pas remarquée.

Précaires aussi sont les refuges montagnards… On ne reviendra pas de sitôt (en fait, six ans plus tard).

Retour au bureau. Le tilleul en face, couvert de jeunes feuilles, tremble un peu. La neige sur Prodin semble avoir fondu. Ciel blanc électrique, nuages sombres au lointain. On rêve d’un bel orage.

 

*

 

Toute une longue journée de pluie, presque sans interruption. Maintenant la nuit est tombée et la pluie crépite encore tout doucement sur le toit du bureau. La nuit est froide. La hulotte s’est tue…

Vaine méditation pendant laquelle tournent en boucle les images de souffrance de ce souvenir confié tantôt par M. C’est la nuit. Pour se protéger des coups de son mari elle s’est réfugiée dans la chambre de son fils, encore tout jeune enfant. Celui-ci l’embrasse, met son bras sur le visage de sa mère dans l’espoir d’empêcher son père de la frapper… M. raconte cela avec le sourire limpide de ceux qui ont traversé la souffrance et, l’air de dire que ce n’est rien, ajoute : « C’est ça, la vie ! »

Plût au ciel, à la terre, ou à je ne sais laquelle de ces forces supérieures qui, de toute façon, se fichent de nous, que la violence épargne longtemps notre refuge, aussi précaire soit-il.

 

2 mai et 5 mai 2009

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