Vigie, janvier 2024

 

Et le courant passe

 

 

Toujours cette alternance trop rapide et presque irrationnelle de confiance et de peur, de crispation et de détente. Entre avant-hier où je me désolais de façon évidemment extrême parce que les résultats catastrophiques de Léo me semblaient rendre inévitable une réorientation et un retour qui s’annoncent difficiles, et aujourd’hui où presque toute cette anxiété s’est finalement dissoute, que s’est-il passé ? Objectivement, rien de très encourageant : une note catastrophique de plus dans sa discipline de prédilection. Mais j’ai discuté, échangé par écrit avec Léo, avec ses profs, décidé comme lui de faire face, vu le parti qu’on pouvait éventuellement tirer de cet échec pas encore consommé. Ma crainte démesurée que cela et d’autres choses encore brusquement s’arrête s’est calmée, cette peur qui était probablement la pire menace qui pesait sur la marche. Ça marche. Je marche, j’avance encore. Ce 24 janvier 2024 est un jour printanier plein de lumière et de chants d’oiseaux.

Soudain les deux chiens s’immobilisent et tombent en extase devant une brindille au départ d’une coulée. Rimski hume, paupières fermées, Nouchka collée contre lui fait de même : harmonie olfactive. Parmi les humains, seul les plus grands nez sans doute peuvent prétendre à une telle félicité, qu’il n’est peut-être possible d’atteindre qu’en ces moments où un parfum à l’improviste rouvre une trappe mémorielle, alors que pour le chien le passage d’un chevreuil suffit.

À propos de mouvements entravés, il y a dans le Gelon ce que j’ai déjà d’abord pris pour une flaque de sang inconcevablement immobile malgré le fort courant, et qui n’est qu’un grand filet rouge accroché à une souche. J’entre dans l’eau pour essayer d’en sortir cette saleté, je tire, Rimski tire avec moi, mais en vain. On laisse derrière nous ce filet rouge qui n’empêche pas le courant de passer.

24/01/24

 

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