Vigie, janvier 2024

 

Des poussières de temps dans les yeux

 

 

Marche sur les bogues molles au long du sentier qui ne crisse plus. En lisière le petit bibelot canin dont je surveille la convalescence et qui a dormi toute la nuit contre moi comme un chat redevient une louve, là où les sangliers ont retourné la terre : il faut la voir humer avec un air hagard, commencer à remonter des pistes dans l’oubli de la longe et avec une détermination qui, appliquée à n’importe quelle entreprise humaine, vous mènerait droit au Graal, au Nobel, aux découvertes éclatantes…

Je contourne l’aulne auquel les enfants grimpèrent autrefois, et je les revois soudain narguant Rimski, encore chiot, qui voulait faire comme eux en montant sur le tronc, ou bien faisant des roulades avec lui, le poursuivant, le rappelant, ainsi les enfants lorsque Rimski est arrivé étaient encore des enfants et je sens le petit couteau de la nostalgie qui me tance, d’une nostalgie plus attendrissante que déchirante en vérité mais on pleure quand même, comme on pleure discrètement, à larmes rentrées, en songeant que le compte à rebours est déjà enclenché qui ramènera Léo à la gare dès samedi, plus que trois jours et des poussières, des poussières de temps dans les yeux.

02/01/24

 

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