Vigie, septembre 2009

C’EST SANS TRISTESSE

La pluie embellit ces scènes de rentrée, qui se doivent de revêtir des parures automnales : ces bancs de brume accrochés aux montagnes, ces arbres défaits, ces feuilles qui jonchent le chemin de l’école.

C’est sans tristesse. On est heureux de retrouver des visages connus et d’en découvrir d’autres, qui seront bientôt familiers puis disparaîtront à leur tour. On touche à nouveau du doigt la réalité, c’est-à-dire la fragilité des choses et des êtres.

T. est venu malgré la maladie.

J’écoute l’histoires de cet enfant qui a quitté en toute hâte sa mère à cause d’un beau-père devenu violent, qui retrouve son père, un monsieur très doux, puis qui se heurte cette fois, lamentable Œdipe piégé par quel destin douteux, à une belle-mère alcoolique et violente que son père ne parvient pas à quitter parce qu’il l’aime quand même…

Devant le bébé de M., un mois et demi, je fonds en larmes parce que c’est la vie même qui est bouleversante.

Ici l’enfant dort et l’horloge fait du surplace pendant que la brume avance. J’aime ce refuge, cette table sur laquelle j’écris, la lumière blanche à la fenêtre et le bouddha doré qui médite même quand je n’y suis pas. J’ai posé derrière la statue un crâne de singe et trois roses fanées ; le crâne reste dans l’ombre du bouddha, singe des pensées ainsi symboliquement maîtrisé.

Demain Léo entre à l’école, avec quelle joie ou quelle insouciance ; on pleurera à sa place.

2 septembre 2009

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