Vigie, mai 2015

 

 

 

PHOENICURUS PHOENICURUS

(une image et quelques lignes pour saluer un visiteur)

 

 

Cela fait quelque temps que le Rougequeue à front blanc semble installé dans le jardin. Posté sur les piquets de la clôture ou sur une branche du poirier en fleurs, il guette les insectes et déploie à perte de champs la « mélancolie voilée » de sa phrase « brève, mélodieuse » mais qui « tourne court, comme si l’oiseau ne savait plus la suite » (on aura reconnu Paul Géroudet). 

Contrairement au Merle de roche (cet autre Rougequeue observé récemment par mon père plus haut, à Valpelouse) ce n’est pas, ou pas encore, un oiseau rare, mais c’est un habitant des forêts de plaine et des grands parcs urbains que je n’avais encore observé que furtivement dans notre hameau montagnard. On ne peut vraiment pas le manquer : la marque blanche de son front prend toute la lumière et le signale partout où il passe. Avant-hier il fourrageait parmi les pierres de la grange voisine et chassait les papillons dans les pruniers (il m’est venu en tête que cette marque blanche à son front était un camouflage ou un leurre) ; hier j’ai longtemps regardé la chorégraphie répétitive de ses va-et-vient entre la clôture et l’étendoir à linge ; ce matin le voici installé sur le poirier, à quelques mètres de ma table de travail, et on dirait que mon compère habituel le Rougequeue noir s’est fabriqué une couronne de fleurs et coloré le ventre dans la glaise…

Il chante. Fenêtre fermée, on l’entend à peine. Fenêtre ouverte, il s’envole aussitôt, emportant avec lui la petite lumière accrochée à son front – et son envol met un terme provisoire à un long moment de distraction qui retardait encore le travail en retard, mais qui était peut-être en fait le vrai travail…

Je continue, un œil sur le livre que je lis, un œil vers la fenêtre.

 

3 mai 2015

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