Vigie, été 2016

 

 

 

LA FÊTE

 

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Ce soir c’est la fête du Villard, à laquelle je me rends seul, sans les enfants ni Nathalie – autant dire sans boussole. Je me racle un peu la gorge pour réutiliser une voix laissée à l’abandon, me rase pour retrouver un visage qui ressemble au souvenir que j’en avais, me décrasse de la peinture et du plâtre de la cave, et sort pour rejoindre le hangar, une bouteille de vin blanc à la main.

Le ciel ce soir, cette nuit, sera superbement étoilé, le temps sec et frais. Joie de certaines retrouvailles, de la musique retrouvée avec Daniel et ses amis musiciens ; mais le vieil homme qui, l’an passé, jouait si bien de l’harmonica, et dont je retrouve le visage sur des photographies anciennes rappelant les premières fêtes du village tel que je ne l’ai pas connu, est mort cet hiver.

On parle de ceux qui sont là, de ceux qui ne sont pas là et pour lesquels, parfois, on s’inquiète. On parle de pays lointains, de Brésil, de Guyane, de New-York ou du Canada, et le hangar s’en trouve une nouvelle fois comme agrandi. 

Cette petite réunion entre voisins est devenue une des étapes qui marquent le passage du temps, au même titre que l’arrivée des rouges-queues ou le départ des hirondelles ; mais elle tient cette année davantage du départ que de l’arrivée. Peut-être à cause du froid qui tombe, mais plus sûrement parce que les enfants ne sont pas là, dont les cris, les rires, les courses sont une musique au moins aussi essentielle que la musique.

River vient seul faire un tour, cependant, et on entend résonner l’écho de la voix de Léo, l’an passé : « Je joue avec River, je joue avec River ! »

On se dit que le temps a passé, que cela fait maintenant neuf ans qu’on est arrivé, que bientôt, que plus tard, qu’autrefois…

On prolonge la conversation jusque tard, pendant que brille au-dessus de la Vallée un ciel criblé d’étoiles.

 

6 août 2016

 

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