Vigie, été 2016

 

 

 

LE BOCAL

 

Vigieété2016bocal

 

Toute la journée je scie et je tape. Plus d’autre musique si ce n’est celle du marteau et de la scie. Je me concentre pour éviter l’accident, la lame qui dérape et emporte un doigt (le pouce est le plus exposé).

Après quelques heures je vais à l’atelier chercher de nouveaux clous, que je trouve dans un bocal en verre sur laquelle est restée une étiquette manuscrite : « abricots 2009 ». C’est l’écriture de ma mère. Aussitôt remontent des images des Vellats, je l’entends parler des abricots qu’elle vient d’acheter, je la revois apporter la confiture. Je revois tout cela avec une précision démoniaque, mais plus du tout le clou que je suis censé enfoncer ni le marteau qui, fatalement, s’abat sur un doigt (ce qui m’offre la possibilité d’enrichir la douleur mentale d’une bonne et vraie douleur physique).

Cette écriture-là, je ne la lirai plus jamais. Plus d’abricots. Des clous. Et un bocal vide dans lequel je passe le reste de la journée à me débattre, et qui finit par terre, en miettes comme moi.

 

9 août 2016

 

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