Vigie, avril 2009

 

 

 

NOCTURNES

 

 

Jours étranges de solitude et de labeur. La nuit durant, le jour entier, je m’affaire pour terminer les travaux de la « mezzanine » puis, le produit enfin passé sur toute la surface du plancher, je m’endors sur la terrasse parmi les chants d’oiseaux et les rumeurs de tronçonneuse.

À mon réveil, le soleil est en train de s’en aller en un coucher fastueux que je contemple un bol de thé à la main (et je pourrais facilement me croire revenu au temps de La Giettaz et du Grillon de l’automne dont je pourrais, si j’en éprouvais la nécessité, écrire ici une suite printanière). À main droite, la boule rouge du soleil s’enfonce derrière la crête du Pic de l’Huile ; à main gauche, une très belle lune aux trois-quarts pleine a déjà pris le relais dans ce ciel bleu pâle qui annonce l’été. Cette chaise longue que j’ai installée sur la terrasse, la chatte Onça en a aussitôt compris l’intérêt et s’y est allongée : je me contente de la chaise. 

Je vaque, je scrute, j’écoute.

Le ciel s’obscurcit. Larges nuages. Puis le paysage se rallume encore comme on remet une cartouche au stylo. 

Maintenant j’habite à l’année mon rêve de vacance.

Des pépiements nouveaux dans l’arbre me signalent la naissance des mésanges. Au même moment le soleil roule de l’autre côté. Cela charbonne encore un peu à l’ouest. Cela se prolonge. J’aime ces longs couchers, qui seront pour quelques semaines encore de plus en plus longs, que je voudrais ralentir encore. 

 

Ménage. Faire briller le sol, les vitres, traquer la poussière.

 

Vers une heure du matin, le ménage terminé, je pars promener dans le village désert comme si c’était le matin. Grande douceur. Seule chante une chouette, une hulotte qui chante là tous les soirs. La lumière bleue du grand écran resté allumé dans la maison du voisin architecte brille, mais pas âme qui vive, pas une silhouette, pas une voix. Les chats me suivent, ravis de l’escapade. Je me calque peu à peu sur leur rythme nocturne. Ensemble nous nous asseyons sur l’escalier branlant d’une maison en ruine, et nous restons là, paupières mi-closes, à humer les odeurs de la nuit…

  

6 avril 2009 

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