NOTES DU GELON EN AVRIL
Un gant bleu
oublié sur l’herbe verte :
l’hiver est parti.
L’enfant maintenant
marche et parle :
« On va la rivière ? »
Tourbillons de lumière
mousse fraîche
renoncules.
Le chant inaudible d’un troglodyte
aussitôt le grand calme, le grand vacarme,
de la rivière l’absorbe.
L’enfant depuis le pont
jette un galet
puis rit aux éclats.
Il y aura toujours
un enfant sur ce pont
dans la lumière du printemps
toujours la mousse
l’écorce lisse des hêtres
et ces feuilles qui resurgissent
et ces pierres et ces ruines
la force du courant à la fonte des neiges
toujours.
Puis l’enfant me rejoint sur mon rocher
« je suis revenu, papa ! »
Il m’offre un bâton de marche
grimpe sur mon dos
avant de repartir tremper ses pieds
jeter des cailloux
consciencieusement.
« Je suis revenu ! »
Il découvre des trésors
bâton-caïman
caillou incongru
qui tous disparaissent
dans les tourbillons.
« Je suis revenu ! »
Tu étais donc déjà venu ici ?
L’enfant gémit
à cause du caillou
bien trop gros pour lui !
Cet arbre aussi
ce vieux hêtre fourchu
je l’ai déjà vu
loin d’ici, en Guyane
sous une autre forme − j’étais
assis sur la même pierre.
Une part de nous
reste et restera toujours ici
à regarder les arbres
assis simplement
à respirer comme eux
avec eux
dans la paix fragile de ce monde trompeur.
« Eh, papa, on continue ? »
17 avril 2009