Route, septembre 2014

 

 

 

 PETITE PLUIE

 

 

Petite pluie très fine, et douce. On roule plus lentement sur la route mouillée, fraîchement recouverte de gravillons glissants qui crépitent sous la voiture et font aussi un bruit de pluie. On roule avec ces précautions qu’on aura bientôt quand la neige et le verglas seront de retour.

Rien ne luit, pas même les mousses ni les feuilles sous la pluie. Puis le ciel très lentement s’éclaire de l’intérieur — le ciel, c’est-à-dire cette masse de coton gris qui m’évoque une aube sur un port breton… Les nuages, une fois de plus, sont notre rivage à portée d’yeux.

Arrivé à la haie des saules têtards, je peux filer parce que cette portion de la route n’est pas encore recouverte de gravillons.

Buisson ardent encore couvert de petites boules rouges : cela toujours lié à l’enfance.

La D207B qui mène à Arvillard a elle aussi été couverte de gravillons ; y rouler fait un fameux vacarme.

Ces jeux d’enfants dans la grisaille, ce clocher gris sur fond de forêt terne, ces herbes rouges le long du bas-côté, ce brouillard dans le fond de la combe : il y a dans ces images une profonde et poignante mélancolie.

Roulant dans la forêt, passant devant le grand tronc nu d’un arbre mort, je ressens soudain, atténuée mais encore vive, la sensation de l’arpenteur de forêt que je suis, que je pourrais être aussi à cette heure si je n’étais pas embarqué dans mon char, et qui invariablement me renvoie à ces longues marches trempées dans la forêt guyanaise.

Puis voici le cimetière, où il faut bien s’arrêter…

 

18 septembre 2014

 

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