Vigie, juin 2013

 EN SECRET

En secret ainsi

caché dans un

sombre et froid manteau de pluie

retiré

en retrait

au fond de la vallée à l’orée

d’un bois assez obscur

pareil au cerf qui

regarde la pluie tomber

et ne brame pas

pareil aux passereaux

qui se serrent au nid

pareil à tout ce qui

grandit dans le repli

pareil à la fumée qui

monte et se mêle au brouillard

et pareil à tout ce qui

parvient au vaste

par dissolution

par disparition

en toute discrétion

en secret ainsi enveloppé

dans le manteau de la pluie

j’accumule

je me dénude

je me travaille

je me triture

je me resserre

je m’agrandis

obscurément, obscur

mouvement mais

mille fougères en lisière

ont fait de même

qui luisent maintenant sous l’averse

sans doute on aurait préféré

quelque chose de plus éclatant

le grand partage dans la lumière

d’un monde fraternel

on s’est senti un temps verger

à tout vouloir donner

à tous pouvoir nourrir et

riche —

le soleil n’est pas venu

personne n’aura croqué les fruits

on reste fougère

limace

oiseau furtif —

un cerf, même rendu muet par l’averse,

c’est déjà trop —

grillon automnal à la limite de son aire

arbrisseau animal

à une seule plume

anonyme

pas moins riche et pas moins invisible

un bouquet de mousse

retiré

en retrait

en secret.

1er juin 2013

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