Vigie, juillet 2013

 

 

 

LITANIE ESTIVALE

 

 

Voilà. Plus rien à faire. Me voici seul sur la terrasse — cette terrasse que j’arpentais naguère, par une après-midi anxieuse de janvier, tentant tant bien que mal (tan tan tan) de déchiffrer les signes du futur afin de savoir si, oui ou non, cette maison qui allait devenir nôtre pourrait être le refuge un peu moins provisoire que les précédents auquel j’aspirais.

Me voici seul, et n’ayant rien d’autre à faire que de m’abandonner à la liberté d’être là. Lire. Écrire. Boire du thé. Guetter les variations du vent, de la lumière, de l’été (il y a un instant l’air était étouffant, mais le vent s’est levé et l’orage n’est pas loin, on entend déjà gronder le tonnerre — c’est peut-être seulement un avion — et le bruissement des bouleaux couvre presque la basse continue des insectes des champs). 

J’écris pour la première fois une lettre à Léo (même si plusieurs textes des livres lui étaient adressés). Devant moi sur la table, outre le bol de thé noir, j’ai placé le roman de Chardonne Vivre à Madère, que je peine à lire, et le gros volume de Jean-Claude Mathieu Écrire, inscrire. Celui-là, il a suffi que j’en lise les quelques lignes de la quatrième de couverture pour aussitôt le vouloir. (Peut-être pourrait-il nourrir le projet intitulé à ce jour Passez par les grottes !, qui tourne autour de la notion de traces autant que de l’expérience des grottes.)

Première goutte.

Premiers coups de canon.

On se replie aussitôt. Le ciel s’obscurcit. Litanie des orages d’été. La chienne se blottit contre moi, paniquée par la foudre qui s’abat avec fracas en contrebas. Puis la grêle crépite sur la terrasse, les fenêtres que j’avais soigneusement nettoyées sont fouettées à leur tour, et c’est une fois encore cette sensation d’un bateau en partance.

 

10 juillet 2013 

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