Vigie, décembre 2020

 

 

 

 

Protégé en pays inconnu 

 

 

decembre2020 04

 

  

Il a neigé et reneigé sur la neige fraîche, tous les fils du quotidien s’en sont trouvés resserrés. On le sent avant de se lever. On sent cette masse de silence qui pèse sur le toit, cette grande ombre froide de la montagne alourdie au-dessus du village. Présence paisible, pas si menaçante ni écrasante tant qu’on reste dedans !

 

Champs blancs, ciel gris.

 

Toute la journée je regarde par intermittence les va-et-vient du rouge-gorge que semble attirer la chaleur de la maison, et qui finira une fois de plus dans la gueule du chat. Sang rouge sur la neige blanche, petit drame, puis la quiétude glacée revient.

 

Il a bien fallu tailler le lilas qui était tombé sur la clôture et gênait le passage. Il y a tant de neige qu’il est même difficile d’aller jusqu’au fond du jardin. On se croirait en pays inconnu.

 

On déneige ; on maintient à coups de pelle la possibilité de partir, mais le lycéen des lieux se réjouit de ne pas avoir à le faire une semaine sur deux. Le câble arraché du téléphone git sur le toit depuis bientôt un mois, que personne ne viendra réparer. On n’est pas pour autant coupés du monde, juste à l’écart, bien à l’abri.

 

Les gyrophares du chasse-neige tournent dans la nuit.

 

Le plaisir suprême, c’est de lire ici, dans cet igloo de douceur, pendant que tombe encore la neige sur la fenêtre de toit, avec le chat qui ronronne sur les genoux et une infusion de calament à portée de main : plaisir d’hiver pour qui ressent de façon si vive, en ce monde inconnu qui tantôt émerveille, tantôt terrifie, la nécessité de rester à l’abri.

 

 

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