Vigie, mars 2023

 

Retour au calme

 

Saule marsault

 

C’est aujourd’hui le jour de parution de mon livre ferroviaire, non-événement qui reste abstrait tant que je ne peux pas voir l’objet. C’est donc en fait un jour ordinaire de tiédeur extraordinaire où je retrouve le chemin le long du Gelon en compagnie de Rimski. La pluie des derniers jours semble avoir doublé le débit du torrent. Le soleil chauffe la résine dont le parfum enivre et apaise. J’ai besoin d’un tel apaisement, après toutes les sollicitations du voyage à Dijon et le concert de Thiéfaine. Je constate que l’impact émotionnel et sensoriel de ces escapades est proportionnel à leur raréfaction, ce qui me fait craindre de n’être bientôt plus capable de sortir de mon lieu, de ma zone de confort comme on dit – ce que néanmoins je m’obstine à faire en narguant mes limites.

Rimski cependant m’entraîne au bord du torrent où il file se tremper, signe certain de la réalité du redoux. Remous et soleil, longues herbes jaunes écrasées entre lesquelles perce la verdure. Je suis tenté d’aller voir si les morilles sont déjà au rendez-vous de mars – mais je suis en basket et non en bottes, ce qui rendrait assez déplaisante une incursion sur la rive détrempée des morilles ; ce sera pour plus tard.

Dans la montée le temps devient d’été, et je me mets à rêvasser à ces promenades que je faisais jusqu’à présent en passant par le col du Champet, promenades que je ne pourrai pas faire l’été prochain car le conseil municipal a autorisé l’irresponsable qui lâche sa meute de patous sur les randonneurs et leurs chiens à occuper de nouveau les lieux, malgré les attaques et les plaintes déposées : je fulmine mentalement contre une telle confiscation des lieux (la température interne monte encore d’un ou deux degrés) lorsqu’un tout petit chien à la voix stridente déboule sur le sentier et, toutes dents en avant, tente d’attaquer Rimski, qui le regarde avec un air interloqué, sans trop comprendre le sens de ces stridulations. Les maîtres récupèrent l’agresseur miniature et le calme revient.

J’admire un moment les petites clochettes violettes et les anémones blanches qui s’épanouissent dans le sous-bois, puis farfouille le long d’un petit affluent du Gelon qui s’est formé tout récemment et dans lequel j’espère toujours trouver des salamandres…

13/03/23

 

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