Vigie, mars 2023

 

Après l’orage

 

 

 

En contrebas de La Martinette, la terre brûlée est maintenant toute rayée de jeunes pousses vertes. La douceur effarante d’hier s’est résolue en un véritable orage d’été qui a grondé et tonné une bonne partie de la nuit, poussant même le chien à rentrer plus tôt que d’habitude.

Au matin la température est tombée et l’on découvre routes et chemins jonchés de débris. Torrents en crue, comme en réponse à ce mois et demi sans pluie. Une longue attente plus ou moins crispée, plus ou moins inquiétante, suivie d’une détente : c’est la tactique du héron pour attraper la grenouille, celle du haijin pour écrire le haïku. Je souhaiterais qu’il en fût de même pour ma propre écriture, le prochain livre trop longtemps rêvé, retenu, averse différée que j’espère voir prendre la forme d’un long orage qui ferait sauter toutes les digues et dont le livre recueillerait les débris.

Travaillant un moment hier soir pendant l’orage à une réécriture du Grillon de l’automne « dans ma mémoire indienne », j’ai rêvé d’en faire un livre tout neuf qui rendrait à ce maigre récit sa profondeur temporelle et émotionnelle, à travers la juxtaposition des époques, et des changements d’énonciation (une troisième personne pour le jeune personnage, la première pour le narrateur plus âgé). Tout ceci fait un matin assez confus, brouillard d’automne, débris de feuilles et de mots dans les flaques, clameurs d’oiseaux, nids détruits, torrents en crue, et ce souffle froid qui vient de la montagne.

14/03/23

 

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