« La lumière chante en nous »
La lumière chante en nous l’essentielle musique
Elle mêle sa voix à nos voix enfouies…
Vasca
Au matin froid tous les non-dits opaques et tous les rêves alourdis de la nuit forment en fond de combe une épaisse couche de nuages laiteux sous laquelle l’hiver n’en finit pas. C’est sur les crêtes et dans ma vallée que la parole se déploie et que les mauvais rêves se dissolvent, maigres névés dispersés à travers les champs jaunes. Les geais lancent leurs cris rauques, c’est une parole qui se délivre. Les grenouilles de la mare recommencent leurs pontes, on les regarde s’accoupler en grappes dans l’eau sombre où se reflète la montagne. Les pics se répondent et avec eux les mésanges, les sitelles, les bouvreuils, les pouillots, les pinsons, et le couple d’autours que je regarde traverser en criant la combe, l’un après l’autre, comme au ralenti (sans être encore tout à fait certain qu’il s’agit bien d’autours). Puis voici qu’à travers la forêt se répand une brume fine qui brouille le paysage, redevenu ici somptueusement automnal avec ses brassées de feuilles acajou, ses écorces luisantes et deux chevreuils plantés en sentinelles au milieu du sentier. On débouche sur le grand champ d’en haut qui est encore tout blanc de grésil. En contrebas file le nuage de brume, à l’intérieur duquel disparaissent les silhouettes des chevreuils. La lumière, les chants d’oiseaux et notre propre envie d’être lumineux et de chanter, débordent des crêtes.
22/02
