LA TRISTESSE
Même en mouvement
même sur la route
même avant l’hiver
à cause du renard renversé
à cause des ruines du moulin
et de la maison oubliée
à cause du vieux mur qui s’effrite
et de ta jeunesse qui s’obstine
à te filer entre les doigts
même en mouvement
même saoûlé d’images
même dans la cage
confortable de ta voiture
malgré les lumières
malgré les couleurs
à cause de l’automne
qui aiguise sa lame froide
à cause du jour qui ne vient pas
et d’« Oblivion » de Piazzolla
à cause de l’enfant qui grandit
et de tous ceux-là perdus sur les routes
de la fuite et de l’exil
à cause des roses fanées
et à cause de ce rêve
où ta mère était si vivante
qu’il te semble l’avoir laissée
de l’autre côté de la route
où elle t’attend et te fait signe
par le nord et le sud
par l’ouest et par l’est
de tout côté te revient
la tristesse.
21 septembre 2015