Notes normandes (août 2016)

 

 

 

Le port (3)

 

Normandie12

 

Sur le port des jeunes gens qui ont l’âge de ceux-là qui, à Omaha Beach, sont restés jeunes pour toujours, sautent de l’écluse en se jetant des toits sous les regards interloqués, ahuris, ou goguenards et quelque peu lubriques lorsqu’il leur vient la fantaisie de se mettre entièrement nus, des badauds attroupés.

 

Plein soleil sur la terrasse de l’ouest où l’on mange en fermant les paupières – et l’on entend mieux alors la rumeur du port, les bruits d’assiettes, les appels, les moteurs, les rires des hommes et des mouettes, les éclats des jeunes gens en mal d’héroïsme et peut-être étourdis non par un idéal mais simplement par la grande force solaire qui inonde ce presque dernier soir du mois d’août et que voile la tristesse de savoir que c’est fini, que ça finit, que nulle jeunesse ne dure et qu’il n’y a peut-être pas de héros.

 

Finir ainsi, près de la mer, dans les rumeurs d’un port, en plein soleil, ce serait d’évidence la fin rêvée, la fin dont j’ai toujours rêvée (si tant est que parler d’une fin de rêve puisse être autre chose qu’un fâcheux contre-sens) ; et finir ici le texte, c’est façon de faire comme si…

 

 

© Lionel Seppoloni, tous droits réservés.

 

 

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