Au Fort de l’Esprit

 

Du peintre

 

Pour Pierre

 

En attendant que le soleil se lève Pierre me raconte son travail de peintre et son rapport aux couleurs (attention : le bleu de Prusse est annonciateur d’infarctus). L’arbre, le lieu, l’objet, l’image, surtout lui parlent. Sa tâche est d’abord de se mettre à leur écoute, de différencier dit-il, de distinguer, de laisser se faire le choix de l’image-prétexte puis laisser se déployer la présence vibratoire des formes sans paroles.

Du jeu des diagonales émerge cet espace qui tient tout le travail  (parfois, un petit rond vide), puis on ajoute les fonds d’ombre et de lumière.

Œuvrer, toucher, relâcher,  y être, en partir, y revenir, cela dure dix ans parfois, ou dix jours. Tu ne sais pas. Tu n’es pas l’auteur de ta toile. Tu ajustes à l’infini d’infimes détails d’où le Tout émerge.

Puis l’ouvrage est terminé et tu quittes le tableau comme la vague se retire, laissant place nette pour le prochain mouvement.

 

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