À L’ŒUVRE !
1.
Quand je dis fleur
est-ce que tu vois la fleur
non une idée de fleur, l’« absente de tout bouquet »
ou quelque silhouette vague que le nom
te dispense de regarder
mais cette fleur-là posée près de toi
rose coupée dans le vase
scabieuse des prés de ton enfance
ou petite pensée qui perce entre les dalles ?
Si, quand je dis « fleur »
les contours de la fleur qui est là devant toi
se font plus nets
si quelque chose comme une fleur intérieure
ouvre en toi sa corolle
alors, oui, tu es à l’œuvre.
2.
Est-ce que la perte
l’idée de perte, le moindre de ses signes avant-coureurs
t’inquiète au point de te faire fuir
dans la première distraction venue
est-ce que tout ton être se tend
est-ce que tu te sens aveuglé
hébété
diminué
ou bien est-ce que tout soudain t’apparaît comme
plus vif
plus âpre
plus urgent plus intense plus nécessaire
au point même de te faire quitter le texte que tu écris
le livre que tu lis
parce que ton enfant te réclame pour jouer
et que rien n’est plus important ?
Si tu laisses là ton ouvrage
alors, oui, tu es à l’œuvre.
5 juillet 2012